LES PIERRES DE L’ÎLE DE PÂQUES GRAVÉES D’ÉCRITURES
© Lorena Bettocchi
Sauvegarde DIBAM Direccion de Bibliotecas Archivos y
Museos Santiago de Chile
Tesis - estudios
Chapitre I
Historique
Île de Pâques, fin 1934.
C’est de cette époque que datent les premiers
témoignages.
Le premier archéologue qui observa une écriture proche du rongorongo, mais gravée sur pierre,
c’est-à-dire un nouveau support, fut Henri Lavachery[1], dans la maison du Pascuan Daniel Chavez[2], gardien de la compagnie anglaise Williamson et Balfour
qui exploitait l’île.
“J’ai remarqué un objet plat
et gris. C’est un galet poli recouvert en partie de caractères rongorongo. Il
est en cours de fabrication. Les caractères s’encadrent dans des lignes tracées à la règle et au crayon. Cinq lignes
et demi sont vides encore. Les
caractères sont légèrement tracés plus grands que sur les tablettes de bois. On
a dû employer la pointe d’une lime”.
L’épouse de Daniel Chavez sera sanctionnée par son mari pour avoir laissé un
étranger trop curieux saisir l’objet au-dessus du placard de la cuisine et
poser des questions au sujet de la
gravure de cette écriture tabou, sacrée, des Maoris rongorongo. Lavachery nota que les caractères ou
signes, étaient plus grands que ceux
qu’il avait pu observer sur une tablette de bois. Il avait emporté avec lui les
calques de certaines tablettes et le moulage de la Mamari.
Alfred Metraux fut également témoin de la
« fabrication en cours » de la petite pierre. Mais il en avait déjà
observé une semblable. Il informa son camarade d’expédition que durant ce même voyage, avant de partir
pour Rapanui, il avait aperçu ce genre
d’objet chez un certain Cascos[3], employé de commerce à Valparaiso. Cascos détenait une
importante collection d’antiquités pascuanes destinées à la vente à des
archéologues et collectionneurs. Cascos venait justement de débarquer sur l’île
et Lavachery supposa que la pierre lui était destinée en échange d’un
instrument de musique : un accordéon.
Alfred Métraux écrivit à ce sujet : Au cours de ces dernières années, les faussaires ont considérablement
amélioré leur technique et s’ils n’avaient conçu la fâcheuse idée de graver leurs signes sur des
pierres, ils pourraient aisément induire en erreur les personnes les plus
averties. (Ile dePâques, Gallimard 1941).
Aucun autre témoignage ou écrit ne fit état, avant
Lavachery, d’écritures rongorongo (gravées sur des pierres) semblables aux signes classiques (gravés sur bois). Le
Père Zumbohm[4] aurait écrit qu’il observa des pierres sur la plage
portant des traces d’écriture. Nous en
reparlerons chapitre V consacré à la pierre du Dr Campbell et chapitre X qui
est la présentation et l’étude de la pierre ronde ref. 4189 du MHN de Santiago
de Chile.
Durant son séjour de 1934-1935, Henri Lavachery découvrit
sur la plage, une petite pierre gravée d’un couple d’oiseaux. En 1914,
Catherine Routledge trouva une pierre gravée d’un homme-oiseau. Mais d’écriture
rongorongo ancienne et classique, conforme aux critères du Corpus Inscriptonium
Paschalis Insulae, gravée sur pierre, si elle a existé, aucune n’a apparu
jusqu’à ce jour. Quelques objets ont été créés, vendus ou offerts à des
fonctionnaires et des officiers de la marine chilienne. Nous ne pouvons pas
appeler cela des contrefaçons puisqu’à ce jour, il n’en existe pas
d’authentique. Il s’agirait plutôt d’un nouveau produit de l’artisanat pascuan.
N’oublions pas qu’à cette époque les Pascuans qui travaillaient pour la Cie
Williamson & Balfour gagnaient 5 pesos par jour, le prix d’un kilo de
farine dans le magasin de la compagnie. L’unique moyen de faire du troc était
l’artisanat : une pierre contre un accordéon, comme le supposait Lavachery.
Nous avons recensé plusieurs objets, postérieurs à 1932 : nous allons les
découvrir plus loin en épigraphie. Il appartient aux archéologues et aux
géologues de tirer des conclusions en toute objectivité. Cependant l’épigraphie
est une science exacte. Thor Heyerdahl pensait que l’un d’entre eux, la pierre
du Dr Campbell, pouvait être ancien…
Malheureusement, mes différentes
analyses vont démonter sa source.
Sauf avis contraire ou démonstration
historique, c’est bien à partir de cette époque (1934) que l’on commence à voir
apparaître des pierres gravées de lignes de différentes écritures, des styles
personnels inspirés de courants linguistiques et artistiques nouveaux ou bien
classiques. L’une d’elle fera l’objet d’une analyse par Thomas Barthel en 1954.
Il s’agit de celle que j’ai eu la chance
d’observer : la petite pierre de la collection REED, actuellement
exposée par le Museo Fonck de Viña de Mar. Mais il en existe plusieurs,
montrant différents types d’écriture :
Décrites[5] par Van Hoorebeck ou
Steven Fisher, nous en rencontrons :
·
Une au Musée de Tahiti et des
Îles de Punaauia. Ecriture genre Tau - N° d’inventaire : (demande en
cours). Une seule photo existe dans l’ouvrage de Van Hoorebeck mais de mauvaise
qualité : on ne voit pas distinctement les signes.
·
Une à Santiago du Chili, au
Museo de Historia Natural. Ref. 4189. Le Musée a eu l’amabilité de collaborer
et m’a laissée la photographier.
·
Une à l’Île de Pâques, au
Museo du Père S. Englert, appelée Gillies Stone. Sans numéro d’inventaire : copie d’une
tablette rongorongo. Le musée a eu l’amabilité de collaborer en m’offrant une
séquence de photographies de bonne qualité.
Décrites par Francisco Mellen Blanco4 ou
Steven Fisher, il existe :
·
Une pierre à Arequipa[6]
(Pérou), nous ne savons pas dans quelles mains elle se trouve actuellement,
d’après Francisco Mellen Blanco elle aurait disparu ; elle fut la
propriété de Monsieur Gair, obtenue du
Pascuan Santiago Pakarati.
·
Une exposée au Museo Fonck de Viña del Mar. La
pierre du Dr Reed. Ref 1035.
·
Une à Oslo, obtenue par
l’Amiral Jorge Videlia Cobo, propriété du Dr Campbell, puis achetée aux
alentours de 1980 par Arne Skjosvold.
·
Une autre à Oslo, au même Kon
Tiki Museum, N° d’inventaire 2149, obtenue du Pacuan Juan Pakarati. (Venant de
la grotte Atan 6,[7]).
SOMMAIRE DES ETUDES EN
ÉPIGRAPHIE
La séquence de
travail honoris causa a débuté en Août 2006.
A ce jour, 24 juillet 2007, il me manque des données
pour les pierres de Punaauia
Chapitre I : Historique.
Chapitres
II, III, IV : La pierre du Musée
Fonck de la collection Reed. Ref. 1035. Date : >1932.
Chapitre
V, VI : La pierre du Dr Campbell, vendue au Kon Tiki Museum d’Oslo. Ref. 4332.
Date > 1932.
Chapitre
VII : La pierre du Kon
Tiki Museum. Ref : 2149. Date >1936<1955.
1.
Chapitre
VIII : La pierre Gillies du Musée S.
Englert de Hanga Roa. Sans ref. Date
>1886<au séjour du Juge Gillies à Rapanui. Epigraphie
de la pierre Gillies, une page surprenante.
Chapitre IX : La pierre d’Arequipa (disparue) <à
la mort de Santiago Pakarati.
Chapitre X : La
pierre du Museo Nacional de Historia Natural de Santiago de Chile. Ref. 4189.
Date non déterminée.
Chapitre XI : Les
pierres de Tahiti auraient disparu
Cette première étude en épigraphie porte sur les pierres connues portant une
écriture se rapprochant de l’ancienne écriture rongorongo de l’Ile de Pâques.
Déjà répertoriées par mon collègue Steven Roger Fisher.
Une étude
complémentaire sera élaborée sur les os
portant une écriture du type « tau », si toutefois les musées
collaborent en envoyant des photos et en permettant d’approcher les pierres
afin d’en relever les tracés.
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[1] LAVACHERY, Henri. 1935
Île de Pâques, Ed. Bernard Grasset. Paris. pp. 250-251.
[2] Daniel Te Ave (Chavez de son nouveau nom) né au tout
début du 20e siècle, recensement du Dr Drapkin, présent lors de l’expédition franco-belge de 1934.
[3] Je n’ai pas trouvé trace de cette famille à Valparaiso.
[4] MELLEN BLANCO, Francisco. 1986. Documents
Espagnols de l’expédition Gonzalez de Haedo, éditions Cehopu- Madrid. Pp200-203.
[5]
FISHER, Steven Roger.
[6]
Documents du Dr Campbell, Museo Fonck,
Viña del Mar, Chile.
[7]
Le clan Atan est celui d’Atamu te Kena, dernier roi de l’Île de Pâques,
monarchie instaurée par le Père
H. Roussel (mission de 1868 à 1871). Atamu te Kena était encore roi
lors de l’annexion de l’île au Chili par
Policarpo Toro.