LES PIERRES DE L’ÎLE DE PÂQUES GRAVÉES D’ÉCRITURES

© Lorena Bettocchi

 

Sauvegarde DIBAM  Direccion de Bibliotecas Archivos y Museos  Santiago de Chile

Tesis - estudios

 

 

 

Chapítre IX Bibliographie et épigraphie  sur la  pierre d’Arequipa, collection Gair, disparue 

 

 

Bibliographie

 

STEVEN ROGER FISHER[1] 

 

Classée dans les « indéterminées ou douteuses», « Pierre de Santiago Pakarati, collection Gair, Arequipa, Perou ; basalte noir, 12x7x1,8 cm -   lignes boustrophédon  dans un style  primitif, probablement gravées dans la pierre avec un outil de métal. Offerte à Gair par Santiago Pakarati en 1930 ; sans doute réalisée à cette époque ».

 

FRANCISCO MELLEN BLANCO[2]

 

« Une autre pierre fut étudiée à Arequipa (Pérou) : son propriétaire Monsieur Gair a vécu à l’Île de Pâques durant la seconde guerre mondiale, et entre les faits qu’il nous a révélés il y a celui d’avoir pu sauver la vie du Père Sébastien Englert,  accusé par les marins britanniques en guerre qui s’arrêtèrent dans l’île, d’être un espion au service des Allemands.  Monsieur Gair, né en Angleterre, défendit le Franciscain, le sauva de toute suspicion  et réussit à le faire libérer afin de continuer son labeur évangélique et scientifique.

La pièce est en pierre, du basalte noir. Sa forme est rectangulaire avec les angles arrondis. Ses dimensions 1,8x70x128. Une seule face présente des incisions hiéroglyphiques, probablement réalisées à l’aide d’un instrument de métal affilé.  Il y a des lignes du genre boustrophédon avec certains caractères classiques, bien que la majorité des signes  n’entrent pas dans cette catégorie, ce qui est dû à la grande dureté du matériel qui rend le travail du graveur difficile.  Elle comporte 121 signes. Elle fut cédée à Mr Gair par Santiago Pakarati il y a environ 50 ans. Nous croyons, bien que la pierre ne puisse être classée comme authentique,  en raison de ce que nous avons spécifié antérieurement, que des experts devraient effectuer des comparaisons avec l’écriture des tablettes.

 

Nous pouvons la cataloguer comme authentique, avec  réserve, dans l’espoir d’une un examen minutieux ».

 

 

 

EPIGRAPHIE  METHODE  responsabilité LORENA BETTOCCHI 

Le difficile « examen minutieux » va être tenté.

 

Doc 1 la pierre Gair et  les relevés de Francisco Mellen Blanco avec le sens d’écriture déterminé par le Dr Campbell –  dimensions 1,8x70x128

 

 

Francisco Mellen Blanco, comme pour la pierre Campbell, fut prudent pour la pierre d’Arequipa. Il situe l’époque[3] de la donation de la pierre.  Il fit le relevé des signes qu’il envoya au  Dr Campbell,  lequel,  dans ses notes   personnelles détermina un certain sens d’écriture :

 

 

Les numérotations des lignes ne sont pas justifiées…

 

 

 

Nous allons durant toute cette étude, utiliser ces tracés. Les seuls à notre disposition. Francisco Mellen Blanco  avait relevé les tracés.  Ce sens d’écriture  pourrait  être différent si nous envisageons l’hypothèse que sur une pierre aussi dure que le basalte, commencer par le centre ou la partie la plus plate est plus facile pour le sculpteur.  De plus aucune étude épigraphique sérieuse n’a permis de retracer l’origine de cette écriture et de la situer dans toute l’épigraphie du rongorongo  du Corpus ou celle des manuscrits des Old Ones.

La tâche n’est pas aisée en raison de cet unique relevé qui pourrait comporter des erreurs et de la qualité de la photo qui ne permet pas de vérifier les tracés. D’où ma lettre du 6 avril 2007 à Francisco Mellen Blanco. La réponse est assez énigmatique et il me dit qu’il me dévoilera cela après la sortie de son livre sur les écritures tardives.

 

1ère  ÉTUDE : RAPPROCHEMENT AVEC LE CORPUS

Prenons  pour critère de recherche le signe de la pierre Gair se rapprochant du 724     que nous  trouvons seulement en Item I (le bâton de Santiago), ligne 2  

 

                                                   724-  

 

et  ligne 14

 

70+62 +71-26-  386y+76 590- 724-724 -90+76 -530-   499-    178?+71-       291-   499-   27V+76-

 

 

Pour être  davantage  précis,   prenons  pour autre critère de recherche le signe  290  ainsi stylisé   qui  figure sur l’Item A en Aa3  (et,  selon Thomas Barthel[4]   en  Ab1 et 5, Br8 et 10, Ca 1, 10, 11 et 14,  Cb 5, Gv6, Kv1, Pr6, Pv4, 8 et 9)

 

        605s-3      85- 006ª-320+ 052       002-  290-   571a-  197f-025-  002-535+020ey-080-004-

 

Observation  1  Nous pouvons  déduire  que la Pierre Gair ne comporte pas la copie d’une  section relative à  un  objet  rongorongo classique.

Le traceur  a adapté   l’iconographie du   rongorongo     classique en raison de la dureté du basalte, ceci pour qq. signes seulement

 

             

 

Il y a deux lignes boustrophédon au centre

 

    Parfois il  apparaît  un  mélange de culture rapanui avec l’apport iconographique du christianisme. L’iconographie chrétienne fait surface, par exemple,  dans L1 :

:

 

          Au premier abord, il s’agirait d’ une écriture semi-symbolique mêlée à quelques signes rongorongo classiques qui eux  ont la caractéristique d’une écriture structurée, car  à chaque signe ou signifiant correspond un ou plusieurs signifiés, groupes verbaux, nominaux ou phrases[5].

De plus il y a ce symbole de gauche qui est une énigme, entre l’écriture chinoise surmontée d’un rei-miro.  

 

        Mais il reste à découvrir des similitudes avec les  figures des manuscrits des Old ones : un signe commun  (fig 103 à 4 élément)  existait  dans la tablette mamari[6] et se retrouve dans le répertoire de Mgr Tepano Jaussen revu par les anciens durant les années 1936/55

 

2ème  ÉTUDE : RAPPROCHEMENT AVEC LES MANUSCRITS DES OLD ONES

     Cet élément, appelé te rake-rake (ce qui signifie mauvais)  existe sur deux pages du manuscrit d’Esteban Atan, ouvrage photographié par Thor Heyerdahl en 1955.  (extrait ci-dessous Doc. 2, fig. 109[7]).

 

 

 

         Esteban Atan Pakomio  fut l’époux de la Esperanza,  fille ainée de Santiago Pakarati et de Amalia Tepano. Né en1923, il avait 20 ans au moment de la seconde guerre mondiale et je ne   crois pas  qu’il était en possession du manuscrit lorsque la pierre fut gravée. En 1936, par contre  les premiers manuscrits prennent forme. Je sais qu’Espéranza  avait  des feuilles de ces parchemins dans ses documents. Son mari m’a donné cette information.

           Le tracé de la pierre Gair est original, unique. Le style des ‘oreilles en triangle’ des signes anthropomorphes serait proche de celui de Leonardo Pakarati, mais j’ai recensé dans mes archives des tracés de Leonardo assez différents, figuratifs.  Les tracés stylisés, abstraits et épurés de pierre d’Arequipa découlent d’un apprentissage original en iconographie. Il s’agit d’un style nouveau à Rapa Nui.   Mais seuls les dires de Gair à Francisco Mellen Blanco, répétés par Campbell puis par Fisher font de Santiago Pakarati l’artisan de cette pierre.  On a cherché à en faire une œuvre authentique, j’ai l’impression qu’on s’est servi de l’image de cet homme sage qui était le fils de Ure Po Tahi. Et les publications des uns qui reprennent les publications des autres font boule de neige et offrent au chercheur des hypothèses qu’il pourrait valider s’il n’est pas perspicace. Donc comme pour la pierre Reed qui fut attribuée au père de Juan Tepano,  comme la pierre Campbell qui fut recensée comme nga-rua, trop de fausses informations ayant circulé  je me permets de rester prudente, afin que ces pierres ne soient proposées aux Musées du monde  à des prix prohibitifs

 

Observation 2   La pierre Gair ne comporte qu’un signe   se rapprochant des manuscrits des ateliers des Old  Ones. Ce signe ayant une connotation négative, je ne pense pas que le sculpteur l’a recopié expressément  du manuscrit.

 

 

CONCLUSIONS

 

La pierre Gair est en basalte noir et comporte 7 lignes d’écriture mixte soit 123 signes. Seulement deux lignes au centre sont boustrophédon. Cependant, elle ne peut s’inclure dans le classique Corpus Inscriptonium Paschalis Insulae.

 

La plupart des éléments d’écriture témoignent d’une création du graveur qui a rajouté quelques signes du rongorongo classique, quelques éléments du rongorongo des ateliers des Old Ones. Parmi les éléments crées, certains paraissent s’inspirer de l’iconographie chrétienne.

 

Achetée durant la première moitié du 20e siècle, c’est une pièce originale, qui comporte trois styles d’écriture. 

 

Comme la plupart des pièces gravées d’écritures, elle s’ajoute  à  l’histoire d’un peuple, dans son histoire ethnolinguistique réelle ou inventée par les visiteurs qui désirent donner de la valeur à leurs achats, produits de l’artisanat pascuan.

 

Deux pierres en basalte noir  furent des pièces d’artisanat : la pierre du Dr Campbell et la pierre d’Arequipa.

 

Un e.mail de Francisco Mellen Blanco me fit savoir qu’il avait perdu la trace de cette pierre.

 

 

 

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Sommaire du dossier sur les  pierres avec écriture pouvant être assimilée au rongorongo

 

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[1]FISHER, Steven Roger. 1995 A provisional inventory of the inscribed artifacts in the three rongongo scripts. Rapa Nui Journal  Los Osos California. P 179.

[2]MELLEN BLANCO, Francisco. 1986.  Documents Espagnols de l’expédition Gonzalez de Haedo, éditions Cehopu- Madrid.  Pp200-201.

 

 

[3] (celle de la seconde guerre mondiale, 50 ans précédemment à sa publication donc entre 1936 et 1944)

[4] Barthel Thomas 1958 Grundlager zur Entzifferung der Osterinselschrif Hamburg  Cram de Gruyter and Co page 126.

[5]  Cf.  Les récitations des anciens rapanui et   méthode sémantique  sur la structure du rongorongo classique  cf www.rongo-rongo.com  Enregistrement  DIBAM Santiago de Chile n° 161587

[6] Ce signe ne fut pas codifié par Th. Barthel

[7] HEYERDAHL, Thor.1975 The art of Easter Island  ISBN O385047169  - Heyerdahl, Thor and Edwin N. Ferdon, Jr.,eds. 1961.Vol I. The Archaeology of Easter Island: Reports of the Norwegian Archaeological Expedition to Easter Island and the East Pacific. School of American Research and Museum of New Mexico. 1965 Vol. II: Miscelanea. Monograph of the School of  American Research and the Museum of New Mexico. Thomas Barthel (the Old Ones manuscrits)