Timo te ako-ako, la grande récitation des signes
Rongorongo tau de la fin du 19e siècle
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La sémantique
est inhérente à la linguistique et le chant rongorongo tau ouvrait les fêtes
annuelles : il honorait les ancêtres. Il ne reste actuellement qu’un chant
de la fin du 19e siècle qui chante la nostalgie de la disparition des Maoris rongorongo encore appelés Timo, les traceurs de signes,
mais aussi la disparition des tablettes. Ce chant est une récitation des Miru, des Veri,
perpetré par Tea-tea le lumineux, enseigné à son fils adoptif Tomenika
Vaka Paté le lépreux, qui l’enseigna à ses petits enfants Gabriel et Matteo
Veri-veri.
Timo te
ako-ako : ce chant nostalgique de la
disparition de leur écriture et des oiseaux du littoral, fut massacré par les
traducteurs.
Le
premier Rapanui qui récita les signes, en sémantique pure et non en lecture, ce
fut Metoro Taua a Ure devant Monseigneur
Tepano Jaussen. Cela se passa à Tahiti
dès l’envoi de la première tablette en 1869, par la tribu de Hanga–roa,
c'est-à-dire les Marama. Puis Metoro donna des indications devant d’autres tablettes (envoyées à l’Evêque en
1871 par les missionnaires), anciennement gardées chez les Hotu-Iti. Un répertoire fut publié en 1893 après la
mort de l’évêque.
Quinze
ans plus tard, en 1886, le Paymaster Thomson explora l’Ile de Pâques, acheta
deux tablettes et muni de photos de l’évêque,
sollicita un ancien nommé Daniel Ure Vae Iko. Thomson publia les récitations dans son
rapport de 1891. La sémantique ne fut jamais étudiée par Thomson qui se contenta
de relever les sottises de Tati Salmon, qui releva phonétiquement ces chants, en offrant aux étrangers des traductions
loufoques.
Les
chants de Ure Vae Iko furent revus en
2004 par Lorena Bettocchi. (cf Ure Vae Iko et diaporama dans www.rongo-rongo.com ou dans www.isla-de-pascua.com. et ceux de
Metoro par les ateliers du Rongo Metua.
Ensuite ce furent les
anciens qui donnèrent des indications à
Katherine Routledge en 1914. Les notes qui nous restent actuellement sont assez
objectives. Malheureusement, sur le rongorongo tau, elles sont
incomplètes. Elle nota la sémantique que
lui indiqua Tomenika affaibli, portant
sur un document de cinq lignes de
figures (se rapprochant du
premier manuscrit de l’Ancien).
Katherine ne publia jamais
ces notes. Par contre son ouvrage contient des renseignements instructifs sur les rituels des Maori rongorongo et de l’Ariki Nga-ara
à Anakena.
|
Voici un relevé de ces figures, la sémantique sur la troisième
ligne. Il manque dans les archives le manuscrit qui correspondrait à ces cinq
lignes. Ce document dévoile donc de la sémantique pure, à
inclure dans la banque de données du rongorongo. Le relevé est de Mrs
Routledge. Les indications sont fournies par
Tomenika avant de mourir, en langue rapanui ancienne. Ce sont des données à considérer
en linguistiques : à un signe ou signifiant correspond un groupe de mots, une phrase, des
informations. Ce sont des signifiés qu’il convient d’interpréter à un
degré supérieur, celui de l’ethnolinguistique, car les notes de la
scientifique britannique contiennent des clés qu’elle n’a pas su déceler à son
époque, car elle recherchait une lecture basique. Ces notes contiennent des explications sur des
figures liées à des sites (ahu) ou à des noms de famille : (le
nom d’Araki est cité deux fois
. Il s’agit d’Araki Tia Pua Ara Hoa a Rapu, l’astronome. |
Contrairement
à mes collègues, je ne me hasarderai point à parler de symboles : il est dangereux de considérer le rongorongo
ancien comme une écriture
symbolique : c’est une écriture structurée comme je l’ai démontré à la 6e
Conference Rapanui et Pacifique de Reñaca (sur www.rongo-rongo.com). Il y aurait
peut-être quelques symboles dans l’écriture archaïque mais sa caractéristique
est autre. Il y en aurait davantage dans l’écriture tardive de la fin du 19e et
du 20e siècle, comme le manuscrit rongorongo
tau ou la tablette du Poike. Mais il
s’agit de l’écriture tardive d’un cycle qui recommence, d’une proto-écriture que l’on crée à nouveau lorsqu’on a tout perdu, la
mémoire d’une humanité qui a failli disparaître de la planète, donc le symbole
y a plus sa place car il représente le
plus souvent le signe distinctif,
intime, d’un homme ou d’un groupe. En Polynésie l’appartenance à un groupe est
une coutume qui fait force de loi.
J’éviterai donc tout amalgame avec le symbolisme, comme le fit Steven
Roger Fisher entre le chant de la
création Atua Mata-riri et le bâton de Santiago, qui contiendrait une série de
symbole phalliques. Le chant Atua Mata-riri n’a rien à voir avec le bâton de
Santiago et les figures interprétées ainsi par mon collègue, à mon sens sont probablement des verbes. Je parlerai
plutôt de logotypes, de signatures et toujours de sémantique dans le rongorongo
tau.
Quand est-ce que les Rapanui utilisaient-ils
ces marques ?
SIGNES
DISTINCTIFS, SIGNATURES
Ces logotypes témoignent-ils de la présence d’un homme ou d’un groupe aux Conseils des Anciens ? Cela est possible selon la tradition
orale, et il serait permis de valider la tradition orale en histoire. Les
signatures ont débuté avec la grande cérémonie de Gonzalez de Haedo, en
1770, cérémonie assimilée par les Maoris
de Mata-ki-te-rangi à un grand conseil, celui qui réunissait les chefs maoris
et les officiers de l’expédition. Deux arikis signent avec leur logotype :
l’Ariki henua Ana-kena et l’Ariki Paka. Il apparaît qu’aucun Maori rongorongo
n’était présent. Seules les tribus du secteur Anakena, Poike furent présentes à
la cérémonies, l’île n’ayant été visitée que très partiellement par les marins
espagnols. Les Ariki Maori ont participé
à la cérémonie protocolaire et signé. N’oublions pas que la veille, Gonzalez de
Haedo demanda, par lettre, qu’il soit demandé aux caciques de signer avec leur
caractères de natifs.
D’autres questions suivent. Ces signatures auraient-elles été suivies :
·
par un
document sur bois : il s’agirait dans ce cas de l’unique tablette du Poike, Item Z, première en
écriture cursive (et en aucun cas pas
les tablettes anciennes Items A à Y, antérieures),
·
par des
témoignages sur pierres (indication d’un
ahu ci-dessus : N(g)a ahu tai ko te Rima, ce qui veut dire : écriture
de l’ahu Ko te Rima, le ko introduisant le nom d’une personne)
·
ou par
des écritures sur parchemin (les figures
de Tomenika) ?
Qui montra la première écriture
cursive aux Maoris comme une nouvelle
disposition de l’écriture, de haut en bas et de gauche à droite, contraire à la
leur de droite à gauche et de bas en haut ? C’est l’officier Aguerra
Infanzon, de l’expédition espagnole de 1770, qui réalisa, avec les Maori de la
première île polynésienne sur sa route,
la première étude lexicale, en
s’aidant de gestes et de dessins. A la fin de sa visite, elle
fut suivie par les signatures maori sur la déclaration d’annexion de
l’île baptisée San Carlos à la couronne d’Espagne, mais les Maoris signent en
lignes boustrophédon.
Puis ce furent les missionnaires, principalement
le Père Hippolyte Roussel qui réalisa le
premier dictionnaire et le recensement, en écrivant devant les Rapanui, puis le
père Montinon qui a tenu les premiers
registres de baptême et de mariages en 1886.
A cette même époque Tomenika avait
une trentaine d’années. Il était
l’ami de Pakomio Maori Ure Kino alphabétisé dans une hacienda au Pérou, après
l’esclavage duquel il s’était évadé et de Barnabé Tori, dont nous voyons le
visage tatoué en page index. Ces
derniers furent les premiers instituteurs.
Le concept d´écriture cursive à
pris forme entre 1770 et 1886, sans oublier la visite de la Flore en 1871, avec l’aspirant Julien
Viaud qui prend des notes et dessine. Pierre Loti fut reconnu comme écrivain
dès sa visite à Rapanui car les natifs le nommaient Tai’O.
(orthographié phonétiquement : Taio)
Tai’serait plus correct en fonction de la relation intime entre Pierre Loti et
le peuple pascuan ( Tai éciture et ‘O paroles, célébration).
LE CHANT
RONGORONGO TAU
TIMO TE
AKO AKO OU LA GRANDE RÉCITATION DES SIGNES
Timo
te ako-ako ce n’est pas de la sémantique au premier degré, c’est ce qu’il
reste du chant appelé la grande
récitation des signes : clamer le titre fait partie du rituel, c’est
un chant tau, des fêtes
annuelles. Selon ma banque de données, Timo te Ako Ako, est
une introduction ancienne. Timo
est utilisé par Ure Vae Iko. Timo est le mot de la langue marquisienne qui
signifie toute sorte de signes. Ou
bien la désignation, la qualité de la
personne qui détient le savoir des signes et de leurs rituels (les maîtres en
écriture étaient des Maori rongorongo). Tomenika était à la fois parent d’un
Timo (sage, probablement son père adoptif Tea-tea selon Routledge) et il
dessinait parfaitement les signes
(timo). Pour les Rapanui à l’esprit saturé par la nouvelle
morale chrétienne, réciter les tablettes mettait leur âme en danger et pour
d’autres Timo était le sorcier.
Histoire de ces rongorongo tau :
·
1886 : publiés
par Thomson et récites par Ure Vae Iko dans le chant Apai. « Timo
te aka piri apai…. », avec les noms des anciens, les prières des chamanes,
dont le chant de la pluie… de très beaux
chants, très poétiques. (voir les chants
de Ure Vae Iko sur www.rongo-rongo.com)
·
1914 : notés par Katherine Routledge, diverses pages
d’informations, la première étant celle du chant de Tomenika qui allait mourir
après sa visite, et la seconde de Fati Hé, également Miru.
·
1936 : écrits par Gabriel Veri-veri , petit fils de
Tomenika, à la suite d’un atelier des
Anciens. Ce sont des informations mises
à jour par tout un groupe de travail,
avec Arturo Te-ao Tori.
·
1970 : publié par le Docteur Campbell médecin à
Rapanui, musicien, qui édita une
traduction du vocabulaire par rapport au
nombre de signes. Il releva ce chant dans
le cahier de Kiko Pate, de la famille
de Tomenika. Le chant est correctement
publié mais l’interprétation par le bon docteur est complètement à côté. Les
Rapanuis ne reconnaissent pas les
interprétations du Dr. Campbell comme fidèles à leur tradition orale.
·
1994 :
Fischer, auto-édition page 434
·
1997 :
Fischer, Easter Island script history and traditions page 312 et 314, nous décrit un
Timo te Ako-ako à sa manière, sans étude lexicale à l’appui, sans rechercher le
véritable Tau
·
2007 :
nouvelle éditon de l’ouvrage du Dr Campell qui répercute sa première traduction…
2007 : Lorena Bettocchi
publie sa version sur le Web (Page
suivante) après avoir étudié :
a)
la calligraphie et tous les écrits de Gabriel Veri-veri,
b)
les
termes du chant, la langue ancienne rapanui
c)
la généalogie des Veri-veri, les notes de
Routledge : Miru et Tomenika.
Ces trois conditions sont indispensables pour comprendre et ne pas
trahir l’histoire.
Pages suivantes :
le rongorongo tau revu et corrigé par Lorena Bettocchi