LES PIERRES DE L’ÎLE DE PÂQUES GRAVÉES D’ÉCRITURES

© Lorena Bettocchi

 

Sauvegarde DIBAM  Direccion de Bibliotecas Archivos y Museos  Santiago de Chile

Tesis - estudios

Chapitre IV   : Épigraphie 

Pierre Reed – Museo Fonck de Vuña del Mar

Ref. inventaire 1035

 

Méthodologie : Lorena Bettocchi

Outils :

Copie de 2 pages de Schulze-Mazier ,reçues le 28 octobre 2006 de la Bibliothèque Mulloy du Museo S. Englert de Hanga Roa.  Je remercie la documentaliste  Lilian Lopez Labbé pour sa collaboration.

Catalogue des signes de Thomas Barthel revu et corrigé par le CEIPP. Documents inédits

sur http://www.rongorongo.org/signs/001099.html- Je remercie  la commission rongorongo du CEIPP et  Jacques Guy pour ce travail considérable et utile à la recherche, la suite va le prouver).  Et merci à notre pionnier, Thomas Barthel.

Relevés des signes recto et des figures verso de la PIERRE REED - Photos de la PIERRE REED, recto, verso et tranche, Courtoisie Museo Fonck de Viña del Mar. Je remercie l’archéologue Gabriela Carmona pour sa collaboration.

 

 INTRODUCTION

 

 

reed_epigraphie1.jpgDIE  OSTER-INSEL, de Friedrich SCHULZE-MAZIER, édité en Allemagne en 1932.

 

Cet ouvrage, de « vulgarisation » selon Thomas Barthel,  recopiait  des signes se rapprochant de la rame  du Tahua Hotu Iti,  avec comme légende :

 

·         Fig 21 : Chrifttafel  (« Kohau Rongo-Rongo ») Vorder und Rückseite

Dans la légende, l’origine du document n’est pas signalée par l’auteur de l’ouvrage, pas plus que l’objet qui a servi d’inspiration au relevé (voir page 2 de ce chapitre).

 

·         Page 193, (voir page 5 de ce chapitre)  figure une planche avec des oiseaux (se rapprochant des pétroglyphes de l’île) ainsi que des signes rongorongo, une ancienne étude. La planche comporte une identification :  H. Balfour dcl.

·                                                     Il s’agit d’Henry Balfour[1] qui fut Conservateur du Pitt Rivers Muséum de l’Université d’Oxford. H. Balfour fit l’une des toutes premières recherches en comparant des pétroglyphes rapanui et des signes rongorongo. C’est une page de son travail qui est reproduite dans Schulze-Mazier page 193.

 

Doc. 1 photo de la  fig.  21 de l’ouvrage de Friedrich Schulze-Mazier, Die Osterinsel, publié en 1932

 

 

 

 

 

reed_epigraphie2.jpg

 

 

L’image de la fig. 21 est montrée ici tournée à 180°, afin de mieux comprendre la lecture du graveur de la pierre Reed. Les détails qui vont suivre, montrent  les deux dernières lignes et présentent davantage d’éléments d’appréciation et de comparaison avec la Tahua Item A.   Schulze-Mazier, non spécialiste en épigraphie,  a publié ce relevé effectué avec  un certain nombre d’erreurs. La Tahua, propriété des SS CC de Picpus se trouvait à Braine-le-Comte, en Belgique[2], à l’époque de la publication du livre. Certaines données nous permettent de déterminer que le dessin ci-dessus n’est pas l’oeuvre de Schulze-Mazier mais d’une autre personne ayant approché suffisamment l’objet afin d’en redessiner les signes (destinés à reproduire la rame ou à graver des fac-similés)[3]. Toujours est-il que ce n’est pas un fidèle calque. Ce que nous voyons ci-après serait… reproduite assez peu fidèlement : la face A de l’Item A coté droit, et la face B de l’Item A centre-gauche.

 

 

 

COMPRENDRE THOMAS BARTHEL EN DÉMONTRANT PAR L’ IMAGE

 

 

 

 

reed_image7 .jpg

reed_image8 .png

Doc. 2 (a et b)   Relevé du recto de la pierre Reed du Museo Fonck de Viña del Mar ref. 1035, et Schulze-Mazier fig. 21  (détail – notes de la main de l’auteur de ces pages)

 

 

Nous pouvons reconnaître ici l’inspiration du début de la ligne du bas de la PIERRE REED ainsi que les erreurs dans la suite du relevé, erreurs que j’ai notées à la main, répercutées sur la pierre par le graveur. Nous analyserons plus loin ces erreurs lors de l’étude en épigraphie, ligne par ligne.

 

 

reed_epigraphie8.gif

 

Doc. 3 Schulze-Mazier fig. 21  (détail)

 

 

Nous pouvons reconnaître ici l’inspiration de la fin de la 1ère ligne  de la pierre Reed incluant le  signe 008 http://www.rongorongo.org/signs/0jpg/008.jpg et les erreurs et créations répercutées…

 

Le graveur  à son  propre style et reproduit  également  la déformation des signes rencontrée  sur le document-source.

 

 

 

 

 

Un élément d’étude sera le signe

008 reed_image1.jpg déformé[4] par le graveur, que nous retrouverons sur une autre pierre, celle  du Dr. Campbell

(chapitre V).

reed_epigraphie11.jpg

Observons également :

←ce dernier signe à droite formé de deux éléments collés,   (une erreur ou bien une création répercutée également sur la pierre du Dr Campbell)

← Et des signes anormalement ronds, déformés.

 

Observation 1,  indépendante de Thomas Barthel : Répercussions d’erreurs sur la pierre Reed, face A : une comparaison avec la Tahua, Item A, répertoire de Barthel  fait apparaître toutes les erreurs de celui qui a prétendu en faire le relevé et nous fournit les éléments complémentaires nécessaires aux vérifications et aux évaluations.

 

Doc. 4.  Tahua Item A verso,  ligne Ab 7

 

reed_epigraphie12.jpg

Doc. 5. Barthel Tahua Item A verso,   ligne Ab 8

 

reed_epigraphie14.jpg

 

 

Observation 2,  indépendante de Thomas Barthel  :  le graveur opère de bas en haut, de droite à gauche. 

 

ÉPIGRAPHIE LIGNE PAR LIGNE :  OBSERVATION DES FIGURES

Voici  donc le nouveau relevé de la pierre Reed, effectué par le Museo Fonck (le premier se trouve dans Runa, Imbelloni. 1954)

Doc. 6.  FACES A  et B  DE LA PIERRE REED MUSEO FONCK VIÑA DEL MAR REF. 1035

reed_epigraphie14.jpg

reed_epigraphie15.jpg

Face A : j’ai repéré le sens des lignes :

La5←

La4←

La3←

La2←

La1←

Et le sens de gravure :

←de  bas en haut, de droite à gauche

 

Face B : j’ai numéroté les 

Figures Fb1, Fb2, Fb3 et  Fb4 la première étant l’oiseau aux ailes déployées.

 

BASES DE L’ÉTUDE  DE LA PIERRE REED  RECTO, FACE A :

 

1)        Considérons que la pierre  Reed comporte  5 lignes d’écriture, La1, La2, La3, La4 et La5

2)        Que la première ligne est celle  qui se termine par le signe  image059.jpg008  

3)        Que le sens d’écriture est de  droite à gauche.

4)    Que la pierre possède quelques signes comparables à ceux de l’ ITEM   A,    ligne  Aa5 du recto[5] et une plus importante série de signes qui se rapprochent  d’une section du  verso (page précédente), lignes  Ab7 et Ab8  comme signalé par Thomas Barthel dans sa lettre du 1er juin 1954 à Imbelloni (avec une confusion recto/verso  puisqu’il n’avait pas encore publié son catalogue et qu’il y travaillait…)

5)    Que la production de Schulze-Mazier  fig. 21, par rapport au relevé de l’ITEM A de Barthel,  comporte des erreurs visibles, notamment dans les deux lignes qui ont servi d’inspiration au graveur de la pierre Reed et des déformations sur les proportions de certains signes.

 

Observation 3    La pierre Reed  du Museo Fonck  comporte bien les signes plus ou moins bien réussis rencontrés dans Schulze-Mazier, fig. 21 comme l’indique Th. Barthel.   

Il y aurait un mince lien  entre l’objet rongorongo  Item A (Tahua) et la pierre de la collection REED.  Mais pas un lien qui détermine l’antiquité de la pierre REED. La rame fut gravée après la venue de bateaux européens autour de l’île[6], > avant ou après Roggeveen en 1722  et <avant  1871, année où elle fut offerte à Monseigneur Tepano Jaussen.

La pierre ne fut pas gravée d’après la rame.  Th. Barthel conclut qu’elle fut gravée d’après un livre qui reproduisit sans trop de rigueur les signes de la rame Tahua en fig.21  et d’après les quatre oiseaux reproduits également dans le livre page 193.  Deux critères de comparaison et d’évaluation rencontrés dans un même livre.

Barthel parle de falsification : cela demande une étude plus approfondie et des conclusions collégiales.  Je dirais plutôt un objet artisanal destiné à la vente à un officier de la marine chilienne.

Il semblerait que le sculpteur  ait suivi son inspiration pour  graver les signes dans la pierre. J’ai trouvé  un ordre bien déterminé: il a débuté par la ligne la plus large afin de mieux utiliser l’espace. Il a travaillé de droite à gauche en commençant par le bas.  Sur la pierre il manque des signes en raison de la cassure de la partie supérieure gauche. Cela se voit dans la suite des tracés et sur la photo de la tranche.

ÉPIGRAPHIE DÉTAILLÉE LIGNE PAR LIGNE,   PIERRE REED FACE A

 

Méthodologie,  responsabilité : Lorena Bettocchi 

Reed La1  -  Se termine par   reed_image1.jpg008a   visible également  en Item A.  Il y a des signes  dérivés de Ab8  + des signes  non dérivés ou créés : 14 signes complets au total + 1 signe coupé en raison de la cassure de la pierre.

Relation avec Schulze-Mazier : OUI, l’erreur de l’auteur du relevé, au niveau du  signe reed_epigraphie16.jpg038   se retrouve dans le tracé de la pierre.  reed_epigraphie17.jpgVoici l’erreur. La voici sur la pierre : reed_epigraphie18.jpg

 

Reed La2 -  Non boustrophedon

Il y a des signes dérivés de Ab8 +  des signes non dérivés ou  créés soit = 11 signes au total + 1 signe coupé en raison de la cassure de la pierre.

Relation avec Schulze-Mazier : OUI,  au niveau du signe reed_epigraphie25.png739b   : la création de l’auteur du relevé entre le 3ème et 4ème signe est répercutée deux fois sur la pierre.  Voici la création sur Schulze-Mazierreed_epigraphie20.jpg. La voici sur la pierrereed_epigraphie21.jpg.

 

 

Reed La3 –   Non boustrophédon

Il y a des  signes dérivés  d’Ab8 + des signes créés, soit 13 signes au total + 1 signe coupé en raison de la cassure de la pierre.

Relation avec Schulze-Mazier : OUI, l’inversion de l’auteur du relevé entre les signes 066 reed_epigraphie22.jpg et 717 est répercutée[7]. Voici l’erreur sur Schulze-Mazier reed_epigraphie23.jpg. Voici  la pierre en La2 reed_epigraphie22.jpg  ainsi suit la gravure en remontant en La3  reed_epigraphie24.jpg  

 

Reed La4   - Serait boustrophédon par rapport à La3 - Il y a des signes plus ou moins bien structurés dérivés d’Ab7 et des signes créés, soit 12 signes au total   + 1 signe coupé en raison de la cassure de la pierre.

 

Reed La5 –  Non boustrophédon.

Il y a des signes dérivés  la ligne Ab7 plus ou moins bien structurés soit 8 signes au total + 1 signe coupé en raison de la cassure de la pierre.

Relation avec Schulze-Mazier : OUI - les deux dernières lignes comportent des créations inédites du graveur, s’inspirant de Schulze-Mazier,  afin d’utiliser au mieux l’espace de la dernière ligne.

 

 

COMPRENDRE THOMAS BARTHEL PAR L’IMAGE : OBSERVATION DES  GRAVURES D’OISEAUX FACE B

 

Doc. 7 (a et b) Relevés du verso de la pierre Reed du Museo Fonck de Viña del Mar et page 193  du livre de Schulze-Mazier.

 

 

 

reed_epigraphie15.jpg

          reed_epigaphie26.jpg

 

 

Doc. 8 Détail ayant servi à graver la pierre Reed selon Th. Barthel,  seul document dans lequel apparaissent simultanément les 4 images la 16, la 17, la 18 et la 19. Source du document : ce sont des recherches et des études comparatives effectuée par Henry Balfour et publiées dans Schulze-Mazier Une partie de cette étude  se trouve imprimée  dans Katherine Routledge (1919).  K. Routledge et H Balfour furent  contemporains. Il semblerait que Schulze-Mazier ait exploré la documentation de l’Académie des Sciences britannique. 

 

 

BASE DE L’ÉTUDE PIERRE REED VERSO, FACE B.

 

Considérons :

 

1)      Que le verso de la pierre Reed  comporte  des  figures (F) apparentées  à  des pétroglyphes numéros Fb1, Fb2, Fb3, Fb4  (le premier signe étant l’oiseau aux ailes déployées), j’ai supposé que,      comme pour le recto, le graveur a opéré de  droite à gauche ;  

2)      Que Schulze-Mazier (1932) page 193, fig. 16. 17. 18. 19   reproduit une étude de Henry Balfour, tout à fait inédite, plus une codification de quelques signes rongorongo précédant celle de Th. Barthel.

3)      Que les figures 16 18 et 19 sont proches de la publication en 1939 de Henri Lavachery[8] (pétroglyphes 220.187.325.354.359.365 relevés sur le terrain durant son séjour en 1934/1935) 

4)      Et que l’une des figures, la 17, reproduit une petite pierre appartenant à Katherine Routledge depuis 1914/1915. 

  reed_epigraphie28.jpg 1                  reed_epigraphie31.jpg  2                reed_epigraphie29.jpg3

Doc. 9  Photos collection K. Routledge Courtoisie British Museum

1 et 3 pétroglyphes du site d’Orongo

2 pierre trouvée par K. Routledge

 

·         Cette face B, si on envisage l’hypothèse qu’elle a été gravée en même temps que la face A,  détermine définitivement, selon Thomas Barthel,  une copie du livre de Schulze-Mazier. Le livre de Katherine Routlege[9]  comporte le relevé de Balfour, mais seulement  Schulze-Mazier comporte  ces deux sources en épigraphie :  le document de Balfour + le relevé de la rame.  La pierre, selon Barthel, fut gravée après 1932, parution du livre de Schulze-Mazier.

 

·         Si l’on envisage l’hypothèse que les deux faces ont été gravées séparément, on pourrait supposer que la PIERRE REED est antérieure à 1932. Encore faut-il    qu’une étude de Balfour ou sa copie soit parvenue jusqu’à Rapanui  après la visite de Catherine Routledge.  Il en est de même pour les envois de Croft à la California Academy of Sciences (1875) ou au Consul britannique Miller. Cette hypothèse est-elle sérieusement envisageable ?

 

 

 

ÉPIGRAPHIE  DÉTAILLÉE DES FIGURES,  PIERRE REED FACE B

 

Observation 4  indépendante de Thomas Barthel   : les signes gravés ne sont pas  identiques á 100 % de ceux dessinés  par Henry Balfour reproduits page 193 dans l’ouvrage de référence soit Schulze-Mazier publié en 1932. 

 

REED Fb1 : l’oiseau aux ailes déployées, s’inspire d’une figure, proche de Balfour numéro 19 mais pas à 100 %. Le Fb1 est davantage  proche d’un pétroglyphe. Le graveur aurait  gravé selon sa mémoire ou selon un document recopié avec des erreurs.

 

REED Fb2 : l’homme-oiseau : s’inspire d’une figure, proche de Balfour numéro 18 : des pétroglyphes existent dans Lavachery n° 84 et 187, avec de toutes autres proportions.

 

REED Fb3 : l’homme-oiseau : s’éloigne de Balfour fig. 17 (le scientifique britannique reproduit page 193 une image inédite ; il s’agit de la reproduction d’une pierre gravée appartenant à Catherine Routledge, image centrale ci-dessus). La Fb3  néglige un détail d’importance qui illustre la légende de l’homme-oiseau : l’œuf dans la main. Le graveur ne connait pas le pétroglyphe 365, relevé par Lavachery, il s’inspire plutôt des   figures. 16, 17 et 18 ou du relevé de ces images, pour tracer à sa manière le  Fb3 et le Fb4.

 

REED Fb4 : l’homme-oiseau s’inspire d’un pétroglyphe, assez proche de Balfour figures. 16 et 18 mais pas à  100 %, en occultant le détail des yeux. Ces pétroglyphes existent  dans Lavachery numéros 325, 354, 359.

 

 

 

CONCLUSIONS EN ÉPIGRAPHIE   AU 28/01/2007 INDÉPENDANTES DES CONCLUSIONS DE THOMAS  BARTHEL

©Lorena Bettocchi  DIBAM Santiago de Chile (tesis y estudios)

 

 

Face A de la pierre Reed du Museo Fonck ref. 1035

 

Il s’agit  de l’utilisation, comme support servant à reproduire,  de la planche 21 du livre de Schulze-Mazier, telle quelle utilisée à l’envers ou recopiée ; je pencherais plutôt sur l’hypothèse qu’on a gravé la pierre  à partir d’une copie manuscrite de la page sur support papier ;

·         Sur la pierre il manque des signes : cela est dû à sa cassure ;

·         Les erreurs de Schulze-Mazier sont répercutées sur la pierre ;

·         Le graveur a inventé d’autres signes ;

·         Il a opéré de bas en haut, de droite  à gauche

·         Il a tracé partiellement une seule ligne boustrophédon.

·         L’auteur a un lointain souvenir des tablettes en tant que document papier ou photo, mais pas en tant qu’objet de bois ancien.

 

 

Face B de la pierre Reed

 

·         Il s’agit de l’utilisation  de la page 193 de l’ouvrage de Schulze-Mazier et des  figures d’oiseaux numéros 16 -17- 18 et 19, d’après une recherche en épigraphie effectuée par Henry Balfour, conservateur du Pitt Rivers Muséum de l’Université d’Oxford.

·         On constate  des différences plus ou moins importantes dans la gravure de chacun des 4 éléments et principalement du Fb3 correspondant à la figure 17. 

 

Sens de gravure de la pierre

 

·         De gauche à droite en commençant par le bas, ce qui n’est pas habituel pour quelqu’un qui saurait écrire l’écriture romaine. Je penche pour le fait que le graveur n’est pas alphabétisé, il aurait commencé en tenant devant lui l’ouvrage à l’endroit. Ou bien, il a utilisé un relevé effectué par lui ou apporté par une tierce personne.  Nous pouvons également envisager cette seconde hypothèse.

·         Il a commencé par la partie la plus large, ce qui est normal car il a plus d’aisance.

 

Conclusions sur la provenance de l’objet 

 

J’ai des doutes sur la provenance de l’objet, qui aurait été cédé au Capitaine Reed par Juan Tepano  autour de 1948.  Juan Tepano est décédé en 1947. Il approchait des 80 ans. Il savait lire et écrire et fut reconnu comme une personne honnête qui échangea bien des informations dès l’arrivée d’Henri Lavachery. Lavachery lui montra des photos et le moulage de la tablette Mamari. Il n’aurait pas fait de faux pas au sujet de coutumes tabou, initiatiques. Il savait que les anciens écrivaient dans le sens boustrophédon. J’ai demandé des précisions à la marine chilienne sur la date des voyages du Capitaine Reed. Je n’ai pas eu de réponse.

En aucun cas la pierre exposée, telle quelle,  donc gravée sur les deux faces, (je suppose à la même époque), aurait appartenu à son grand-père comme l’indiquait le Docteur Reed. Par contre la rame Tahua, Item A, a appartenu au Tahua Hotu Iti[10], qui vivait dans le même secteur que Rano, le père de Juan Tepano, mari de Veri-amo[11]. Il vivait autour du Rano Raraku. Nous ne savons pas d’ailleurs quel grand-père aurait cité Juan Tepano.  Nous n’avons pas de précisions historiques au sujet de la rame sauf qu’elle est en fraxinus excelsior, le frêne servant à fabriquer les rames des voiliers européens, et ce depuis le 17e siècle.

Voici pour l’origine de la pierre. Encore faut-t-il que nous soyons certains qu’elle provienne de Rapa Nui. On peut supposer qu’elle a été sculptée  à  Rapa-Nui,  entre 1932 et 1948, date de son acquisition comme le spécifie  la lettre du Dr Reed à Imbelloni.

Par contre nous savons que les Cascos de Valparaiso détenaient ce genre d’objet (observation d’Alfred Métraux) années 1934/1935 donc, et que Cascos voyageait régulièrement à Rapanui afin de faire commerce d’objets provenant de l’île.

 

Conclusions par rapport au livre de Schulze-Mazier 

 

Si la pierre Reed fut sculptée à Rapa Nui, ce fut après l’arrivée du livre de Schulze-Mazier dans l’île ou d’une copie manuscrite de la fig. 21 et de la page 193, apportée de Valparaiso ou d’ailleurs. Le seul livre de Schulze-Mazier qui  fut répertorié à Rapa Nui est celui de la bibliothèque de William Mulloy. Betty Haoa, la bibliothécaire du Museo Fonck le détenait dans sa bibliothèque jusqu’au transfert du fonds documentaire au Museo du Padre Sebastian Englert.  

Qui donc détenait  à Rapanui ce livre de vulgarisation édité en  Allemagne en  1932 ? Difficile à dire. Une certaine quantité de livres est arrivée lors de l’expédition franco-belge avec Alfred Metraux et Henri Lavachery, et également lors de l’expédition de l’Université du Chili en 1935, avec le Père Sebastien Englert. 

           

Conclusion par rapport à l’écriture classique du Corpus Inscriptonium Paschalis Insulae 

 

Les témoignages de Lavachery et Metraux laissent à penser que ces objets artisanaux sont nés durant la première moitié du 20e siècle, dès l’arrivée des archéologues venus d’Occident ou de marins  venus du continent chilien, accompagnés par des commerçants. Certains de ces objets sont exposés dans les musées qui détiennent des collections de l’Océanie et prennent  de la valeur en tant qu’œuvre d’artisanat. La jolie pierre de la collection Reed fait partie de ce genre d’objet.

 

La pierre Reed du Musée Fonck ne peut être considérée comme comportant l’empreinte  des signes rongorongo classiques,  gravés par les anciens sur objets de bois, en raison de la déformation des signes, de la création de  figures nouvelles, du non respect du sens boustrophédon et de l’inspiration d’un ouvrage de vulgarisation sur l’Île de Pâques daté de 1932.

 

LA PIERRE REED DU MUSEO FONCK DE VIÑA DEL MAR REF. 1035 NE PEUT S’INCLURE DANS LE CORPUS INSCRIPTIONUM PASCHALIS INSULAE, PATRIMOINE IMMATERIEL DE L’HUMANITE.

 

©Lorena Bettocchi     Juin 2006-juillet 2007

 

 

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[1]  BALFOUR, Henry.  Dec. 1917 Some ethnological suggestions in regard to Easter Island, or Rapa Nui (Folklore, Londres). The statues of Easter Island 1921

[2]Offerte à Mgr Tepano Jaussen en 1871, elle sera conservée par la congrégation des SS. CC. De Picpus à Braine-le-Comte en Belgique, jusqu’en 1953, puis le patrimoine des objets rongorongo sera transféré au siège de Grottaferata près de Rome.

[3] Barthel écrivit : des copies des premières photos (oar) arrivèrent en 1874 envoyées par  Croft à la California Academy of Sciences  et  autour de 1875 du consul général britannique  Miller à Palmer.

[4] CATALOGUE DE BARTHEL REVU PAR LE CEIPP : il y a en réalité plusieurs signes 008, qui seront codifiés prochainement, travail utile à la recherche.

[5] LIGNE Aa5, non reproduite ici, se trouve sur www.rongorongo.org, item A

[6]  Qui aurait  navigué dans le secteur et perdu une rame sur laquelle on aurait gravé ou recopié les lignes d’une tablette ?  Mendana, sur la route des îles Marquises en 1595, puis Davis, qui relata l’existence d’une terre 1686-1687, enfin Roggeven qui l’explora en 1722.

[7] Codif CEIPP visible sur Item A  site. www.rongorongo.org – le 717 n’existait  pas dans Th. Barthel. La commission rongorongo du CEIPP a revu et corrigé ce répertoire,

[8] LAVACHERY, Henri. 1939. Les pétroglyphes de l’Île de Pâques, Edit. De Sikkel.

[9] ROUTLEDGE, Katherine, 1919, The Mystery of Easter Island, London

[10] Hotu Iti, Tupahotu et Iti Uira étaient des familles de la tribu  Miru, unie au départ, comme le constata Gonzales de Haedo en 1770[10]. Mais par la suite, à la moitié du 19e siècle, elles furent séparées par des luttes tribales et les objets changèrent de propriétaires.

[11] Baptisée Victoria Viriamu, fille de Huki a Para-para, famille Nui Hiva, tribu Koro O´rongo.