Tablettes
rongorongo : banque de données polynésienne
1886 Récitation de
Ure Vae Iko devant la tablette Mamari Item C
© Lorena Bettocchi DIBAM Santiago de Chile (enregistré dans estudios y
tesis, 2007)
Chapitre
IV Le Maori Ure Vae Iko récite devant
William Thomson
1886 William Thomson acheta deux tablettes à l’Ile
de Pâques, la petite et la grande de Washington. Muni des objets et des photos
réalisées à Tahiti alors qu’il visitait Monseigneur Tepano Jaussen, il tenta
d’interroger Ure Vae Iko, né en 1803. L’Ancien avait été durant sa jeunesse
maître de cérémonies et serviteur du roi Nga-ara qui organisait chaque année des cérémonies
sur l’écriture rongorongo à Anakena.
Quinze années après la
récitation de Metoro devant Mgr Tepano Jaussen, la représentation de la terre
pour les deux Pascuans fut la même. Ure
Vae Iko récita cinq chants et Thomson
publia qu’ils correpondaint à
cinq tablettes. Les premières paroles notées phonétiquement par Salmon firent
que l’on nomma ainsi les tablettes ce qui est une erreur. Les Pascuans qui à présent étudient en faculté désirent que
les choses soient revues et corrigées. Seules les tablettes Mamari et Echancrée
conserveront donc l’adjectif qui les caractérise, car il correspond à leur forme physique et non à la linguistique.
Voici donc le chant de Ure Vae
Iko en 1886 devant la tablette Mamari. Mes commentaires figurent à
droite du tableau qui suit. Sur la gauche, j’ai fait figurer la restructuration
des paroles du texte ainsi qu’en
italique, le texte d’origine, celui de Thomson. J'ai essayé de respecter
au maximum les syllabes et la phonétique fournies par Thomson.
Je confirme le contenu de cette étude en sémantique, après m’être penchée sur tous
les chants d’Ure Vae Iko (voir lexique sur
www.rongo-rongo.com ou à la DIBAM de Santiago)
Parmi tous les chants d'Ure Vae Iko, celui-ci
contient également des informations sur
le rongorongo, le grand message, son caractère sacré et son utilité. Il décrit la Mamari,
rapidement, avec ses seuls souvenirs,
car les photos, surtout celle du recto, ne sont pas nettes. « Il décrit le contenu du livre sans
pouvoir l’ouvrir » dit Thomson. Je doute fort qu’il s’aida des images
présentées par Thomson dans sa première publication (voir
fiche technique et photos de la Mamari).
Thomson n’avait pas d’autres photos que celles prises à Tahiti chez Mgr d’Axieri (Tepano Jaussen) qui en envoya une série
partout en Europe. « Pendant que le
Mohican était ancré à Tahiti, l’évêque gentiment nous permit d’examiner ces
tablettes et de les photographier ».
La tablette avait appartenu à un tohuka, un chef de
clan, Vaka Mamari Pane Koiroro, constructeur de pirogues et sculpteur de crânes
et, comme son nom l’indique possesseur de la tablette ovale (mamari veut dire
œuf ou ovale). Mais à l’origine, elle ne
devait pas lui appartenir. Elle dut passer dans les mains des prêtres ou des
Maori rongorongo de la dynastie Miru, jusqu'à ce que son descendant en fasse
don au Père Zumbohm.
Voici une information très importante, souvent passée sous silence
pour occulter la récitation de Ure Vae Iko : Thomson confirma que Kaitae
récita les tablettes de la même manière qu’Ure Vae Iko. Nous n’avons pas de
photo de l’ancien, mais nous avons le
portrait de Kaitae.
Documents rencontrés avec une partie du texte souligée (notes du Dr
Campbell). |
Inscrit sur les registres
d’état civil : Kaituoe Kaitae,
baptisé Napoléon, né en 1806 |
Noté par Thomson : « Un ancien appelé
Kaitae, qui prétendit avoir un lien familial avec le dernier roi
Maurata, reconnut plus tard plusieurs
tablettes photographiées et nous
récita la même histoire, exactement pareille à celle qui nous fut
précédemment contée par Ure Vae Iko » |
Chant de Ure Vae Iko devant la photo de la
tablette Mamari
Texte Atea renga kohan iti poheraa de Ure Vae
Iko
1. Atea renga kohau Raa me’e a Ite a matua hakake 2. Ka tagi, Renga-a-manu hakaopa ; Chiu runarame
a ita metua. Ka ke 3. Tu te
nga Hiro E te hoa e ? 3
.Tu te nairo hihi - O te hoa ! Eaha ton tiena - e te hoa-e ! Ita haga ta
poapatu – O te
hoa ! O te hoa e 4.Kahii te riva forani - O te hoa-e : 5. A ue ka tangi 6. He aha tau
teina E te hoa e ? Tahiti ena 7. Ana
piri atu ; Ana piri atu ; ana taga atu |
Sémantique possible mais non
exhaustive 1. Ate
est la chant - renga se dit de la beauté, de ce qui est illustre, kohau ou kohau
est le bois, la tablette, le fil conducteur qui relie aux ancêtres – Iti po la petite nuit, le crépuscule
- era’a
autrefois 2. Sémantique : ka (impératif) tangi : le chant triste, le pleur,
pleurer – manu est aussi bien
l'oiseau que l'être spirituel ou les enfants, les jeunes gens. Valeureux : hakake
- Faire descendre : haka topa- raa
est la lumière ou le soleil - sur : ki runga - chose meé
: il s'agit de la tablette " mamari " - ite veut dire savoir, connaître. 3. Debout, vertical : tu-nga signifie aussi
bien tous, groupe ou tribu – Hiro est une nuit du calendrier
lunaire : O’Hiro, mais
également une étoile rouge. haka
ihi : femmes qui se mettent en rang pour chanter - Amis, frères,
camarades : hoa - célébration : O –tau : bon et beau. Que veut dire ? :he aha ? –tapu : sacré,
interdit - nuit : po – ite
connaissance de la nuit - ite hanga : savoir-faire, savoir-aimer... hanga
: apprécier, aimer. Ite po
: connaissance/nuit : astronomie 4. Sémantique : mouvement de
femmes en cercle haka ihi - Bon :
riva Français -
farani en langue tahitienne - ce mot a émigré à
Rapa Nui avec l'arrivée de bateaux venant de Tahitit - frères : hoa 6. He
aha veut dire : que signifiait ? -
amis, anciens : hoa- frères : teina
... Tahiti ena : là bas, à
Tahiti - maison : hare - oro´a fêtes religieuses : mot tahitien, c'est de
Tahiti que viennent les mots se rapportant à la religion. Hare oro’a : Eglise - moni :
argent, mot tahitien dérivé de l'anglais -
ori miro : bois/danse bois/chant - tablette rituelle
des cérémonies (Sceptre maori en
Nouvelle Zélande). 7. A : être exister - na
: ici - rejoindre, relier : piri - Dieu, Esprits des ancêtres : Atua
- tanga humain, homme. |
D'autres interprétations peuvent être considérées pour peu qu'un travail
sérieux et réel fut élaboré sur tout le langage de l'ancien et sur tous ses
chants (cinq), dans le respect des hommes et de leur culture... Voici le résultat
de mes études en sémantique ou une possible interprétation des chants de Ure
Vae Iko
1. Un beau chant au crépuscule, au
temps des Anciens
2.Beaux jeunes gens gémissons ...
Afin que la lumière descende sur la tablette de la connaissance ...
Louons nos valeureux ancêtres !
3. Levez-vous, amis !
Prenez place pour la célébration de
Hiro.
Que signifiait ceci pour nos bons frères ?
Oui, pour nos anciens !
Cela signifiait qu'ils connaissaient
et pratiquaient les rituels nocturnes
Debout !
Célébrons ces frères !
4. Bon Français !
Camarades, mettez-vous en place
Oui, célébrons nos anciens !
5. Oui, c'est cela ! Pleurons !
Comme pleure l'orage et la petite pluie !
6. Que disaient nos bons frères, nos
anciens ?
7.Là-bas à Tahit où se trouve la maison des prières,
l'église ...
A Tahiti, les bois de la connaissance et des rituels,
Cela peut se vendre ...
7. Mais pour nous, les bois de la
connaissance représentaient les
Esprits....
Nos esprits protecteurs ....
Ils reliaient les hommes du temps présents aux Esprits
protecteurs ..
Etude lexicale ou méthodologie à la
manière Bettocchi
Avant de traduire, il faut choisir les mots justes et parfaits, comme nous
l’a enseigné Ure Vae Iko
A : être,
exister
Ate est le chant
Ati: la tempête,
l'orage
Atua : Dieu,
Esprits tutélaire, Esprit des Anciens
Aue: gémissement
: oui ! gémissons !
Ena : là bas
Farani : I
en langue tahitienne : Français -
haka ihi : femmes qui se mettent en rang pour chanter
Haka topa : faire
descendre
Hakake :
savoir-faire, habileté ; valeureux
Hanga apprécier, aimer
Hanga po :
apprécier, aimer la nuit
Hare oro’a : Eglise (oro'a célébration religieuse en
tahitien)
Hare: maison
He aha ? que veut dire ?
Hiro, c’est un
Dieu polynésien- un astre rouge dans le ciel
(comme Mars, Betelgeuse ou Aldebaran)
Hoa : amis,
frères, camarades –
I runga : sur
Ite :
connaissance
Ite po :
connaissance/nuit, astronomie.
Iti : petite
Iti po : petite
nuit, crépuscule.
Ka introduit l'impératif
Ka tangi : pleurons, chantons
Kohau ou kohau la tablette, le fil
conducteur qui relie aux ancêtres
Manu est aussi bien l'oiseau que l'être spirituel
ou les enfants, les jeunes gens.
Matua ke : le chant des anciens (tablette ke iti , le
petit chant)
Mee : chose, élément
Miro : bois ; ori
miro : bois chantant, dansant, tablettes
des cérémonies, des rituels
Moni : argent - mot tahitien venant de l'anglais ou du
français
Na : ici.
Nga: tous, groupe,
tribu
O : célébration
Ori : chant, danse
Oro’a : fêtes religieuses : mot tahitien
Piri : rejoindre, relier, coller, marier
Po : nuit
Raa : l'aube,
le lever du jour, la lumière
Renga : se dit de la beauté, de ce qui est illustre
Riva : bon
Tanga : humain, homme
Tangi : le chant triste ou les pleurs
Tapu : sacré,
interdit.
Teina: frères
Tu : debout, levé,
vertical
Ua : pluie.
Vous
aviez dit menteur, mystificateur ?
Ure
Vae Iko récita devant la tablette Mamari en donnant ces indications générales.
Il parla de son contenu comme le signala Thomson (comme quelqu’un qui tient un
livre fermé mais explique ce qu’il contient).
Comme on douta de ses capacités, les photos
furent échangées sous ses yeux, il continua sur sa lancée (le chant que Kaitae
et lui connaissaient bien). Lorsqu’il se fâcha car on mit en doute son
honnêteté, il donna l’explication suivante :
« la signification de chacun des signes est tombée dans l’oubli
mais ce qu’il nous reste c’ est le contenu de la tablette, ce qu’elle représente ».
Son chant fut traduit par Salmon comme « Love
Song », mais il y eut confusion.
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