Dossier
sur la tablette rongorongo Mamari, Item C : la banque de données
polynésienne © Lorena Bettocchi DIBAM Santiago de Chile (enregistré dans estudios y
tesis, 2007)
Chapitre II Les astronomes de Mata-ki-te-rangi
Le premier scientifique
qui s’intéressa à l’astronomie fut
Thomson, qui visita «Te pito te henua »
après avoir fait escale à Tahiti. Il fit un recensement de la population
et rencontra des Pascuans qui le renseignèrent en vocabulaire rapanui. Il nota
donc les mots anciens des douze mois de l’année et des 28 nuits du calendrier
lunaire. Thomson élabora à cette occasion,
la troisième[1]
étude lexicale de l’arero rapanui.
Voici les documents
nécessaires aux astronomes des temps modernes. Ici les douze mois de l’année en
1886, orthographe restructurée
Ana-kena : août
ce qui signifie la baie aux oiseaux et également l’époque des fêtes
annuelles sur le rongorongo. Ana-kena fut également un Ariki.
Hora-iti septembre (le petit été) - iti veut dire petit, hora est le printemps
polynésien, la fin de l’hiver juillet et août
Hora-nui : octobre (le grand été)
Tangaroa-uri : novembre Tangaroa est l’Atua de la mer et uri signifie
obscur, noir.
Ko Tuti : novembre/décembre Ko
introduit un nom de personne,
c'est-à-dire Tuti (le joueur de tambour, le son
du tambour en marquisien)
Ruti : décembre/janvier
Koro : janvier
Tua-haro : fevrier
Te nupu : mars
Tara-hao : avril
Vaitu-nui : mai grand hiver
Vaitu-poto : juin, petit hiver
Maro ou Te
maro : juillet
Voici le calendrier
lunaire confié à Thomson en 1886 et la traduction de l´époque. La sémantique
liée á ces mots du calendrier lunaire, à part chez les Polynésiens ne fut
jamais réellement explorée par les linguistes, sauf Jacques Guy et moi-même.
Thomson introduisit une liste de mots, une étude lexicale et renseigna les lecteurs et la Smithsonian Institution
que les Maori de la Easter Island
parlaient une langue malayo-polynésienne. Il n’alla pas plus loin. Monseigneur Tepano Jaussen à Tahiti écriv it
la même chose dans son manuscrit « L’empire Maori », jamais publié
mais dont j’ai une copie.
Voici la vananga
Tui : la langue de la grande baie de Tui (indiquée par Orion). Orthographe
non restructurée.
27 novembre Kokore tahi (premier kokore).
28 novembre Kokore rua (deuxième kokore)
29 novembre Kokore toru (troisième kokore)
30 novembre Kokore ha (quatrième kokore)
1er
décembre Kokore rima (cinquième kokore)
2 décembre Kokore
ono (sixième kokore)
3 décembre Ma-huru premier quartier
5 décembre O’hua
6 décembre Ohotu
7 décembre Maure
8 décembre Ina-ira
9 décembre Ra Kau
10 décembre Omotohi
(pleine lune)
11 décembre Kokore tahi (premier kokore).
12 décembre Kokore rua (deuxième kokore)
13 décembre Kokore toru (troisième kokore)
14 décembre Kokore ha (quatrième kokore)
15 décembre Kokore rima (cinquième kokore)
16 décembre Tupume
17 décembre Matua
18 décembre Orongo
(dernier quartier)
19 décembre Orongo
taane
20 décembre Mauri
nui
21 décembre Mauri
Kero
22 décembre Omutu
23 décembre Tueo
24 décembre Oata
25 décembre Oari
(nouvelle lune)
26 décembre Kokore
tahi…etc
Je me suis penchée sur ces 28 nuits
en étymologie car le secret du
rongorongo est dans l’étymologie, en allant rechercher si les mêmes signifiants
existaient ailleurs, jusqu’aux Iles Tonga, en raison principalement de cet ahu
avec 15 Ariki Tonga sur la plateforme, et puis aussi parce que les ancêtres qui
débarquèrent en Terre des Hommes (les Iles Marquises), les ancêtres donc nommés
Atea et Atanua venaient de Vavau aux Iles Tonga, lesquels furent visités par
les Lapita en provenance de la Malaisie...
Voici ce que j’ai trouvé :
Crépuscule/nuit/aube |
Signifiants
= Groupes
verbaux ou nominaux, phrases en arero rapanui, e’o enata, arero tonga |
= Divers
signifiés Sémantique (non exhaustive) |
1ère
nuit précédant la nouvelle lune nuit noire |
O’ata Arero
tonga : Ata matua Ata moe E’o enata : a
tahi Ata A rua ata A toru ata ou a
tou ata etc... |
Célébration (O’) depuis
l’Aube (Ata) First sign of daylight Visions of the night L’aube de la lune, la 1ère aurore La seconde aurore, La lumière, l’esprit des ancêtres. |
2ème nuit Nouvelle lune parfois mince filet |
O’Hiro O’Ari’i E’o enata :
Mahina na’o |
Célébration du demi-dieu Hiro qui vit
dans la mer et
monte au firmament féconder la
lune. Célébration de la nuit des Ariki
(devant le moai le plus ancien a Anakena avec les tablettes rongorongo)[2] Nuit sans lune |
3e à la 8e
nuit |
Ko-kore tahi,
e rua, e toru, e rima, e ono… Mahea-ma
/tai, vave en marquisien |
Turbulence de la mer, marée, lune
montante durant 5 nuits – en
marquisien seulement sur 2 nuits, la 4e et la 5e. |
9ème nuit ou premier quartier |
Ma-haru Arero tonga : maanu ou maaru |
Le retour Le retour, les oiseaux nocturnes |
10ème nuit |
O’hua E’hua Veo en e’o enata |
Célébration de la cueillette des fruits, de la
fructification, de la récolte Le harpon, célébration de la pêche
au harpon la nuit |
11ème nuit |
O’tua |
Célébration du labour de la terre |
12ème nuit |
Ma-ure Hotu’a O’tua |
Célébration de la fécondation de
terre- mère, de la fécondation de la
femme, de la fertilité de l’homme, de l’Ariki. |
13ème nuit |
Hina i-rae |
Hina déesse de la lune Premier (rae) astre – ira’é
(avant) |
14ème nuit |
Ra-kau Arero tonga : rakau |
Célébration de la croissance des
arbres et des plantes Trees, shrubs, plants |
15ème nuit Pleine lune |
Omo-tahi Mahina
taka-taka E’o
enata : Hotu nui - honu nui |
Essentielle, première (tahi) Nourricière (omo) Tatake enceinte, ronde (mot doublé
emphase, très ronde) Pleine lune, la tortue, la
nouvelle tortue. |
16ème à 20ème
nuit Lune descendante |
Ko-ko-re
tahi, rua, toru, ha, rima |
Turbulence de la mer, marée, lune
descendante durant 5 nuits |
21ème nuit |
Tapu-me ou tapu-me’e Arero tonga : tapu Me’e |
Célébration des chants ou des choses
sacrées, de la poésie ou des rituels
du rongorongo. Sacred Chants, poems |
22ème nuit |
Matua |
Célébration des ancêtres, ou
célébration de Hoa tu Matua, ou du moai les plus ancien. |
23ème nuit Dernier quartier |
O’Orongo |
Célébration de l’Atua Rongo (protecteur des récoltes) |
24ème nuit |
O’Rongo Tane |
Chants rituels réservés à Tané
demi-dieu, fils de Rongo et de la Terre. Célébration des hommes polynésiens,
des gardiens des récoltes. |
25ème nuit |
Maori ou Maui nui |
Célébration de l’homme Polynésien
et du peuple maori. |
26ème nuit |
Maori ou Maui kero |
Fin de la célébration la 2e nuit de Maui se
termine |
27ème nuit |
O’mutu Arero tonga mutu |
Fin de l’apparition lunaire To be at the end |
28ème nuit |
Ti-reo, Tui
reo Tu-e’o |
Le parler, le langage (fin des
tabous, liberté du langage), nuit du langage des ancêtres qui venaient de Tui
(direction d’Orion) |
Apparemment,
pour le Tohuka-ite-hetu, Sage qui a la
connaissance des étoiles, une seule nuit n’était pas tapu. Chacune des nuits servait à une
célébration : observer la lune et le firmament puisque d’autres Atua se
manifestaient pour honorer la vie, la fécondité, les récoltes et
les ancêtres.
Thomson fut le
premier scientifique à recueillir les mots des anciens astronomes de Mata ki te
rangi. Ces mots sont presque identiques dans d’autres contrées de Polynésie.
Ils constituent le nucléus du proto-polynésien, certains se sont perdus avec la
modernité. Rapanui fut la dernière touchée et il semblerait que ces nuits de la
tradition orale restèrent intactes, du moins jusqu’à l’arrivée de Thomson en 1886.
Qui renseigna Thomson ? Nous
connaissons deux astronomes : Araki-tia
(mot ancien A rangi Tia) Pua Ara Hoa.
Il avait 24 ans lors du séjour
du nord-américain qui le
rencontra, ou rencontra sa famille, puisqu’il figure sur son recensement et
Tori a Rangi (Tori du ciel) que j’ai
essayé de dessiner jeune
homme. Araki-tia était encore vivant lors du séjour de Katherine
Routledge qui réussit á évaluer son année de naissance soit 1846, il était
marié à Parapina Veri-Haka-Tea de la famille de Tomenika Tea Tea. Katherine
Routledge fit un croquis de ses tatouages.
L’astronome
enseigna le calendrier lunaire à Barnabé Tori, son contemporain et à Juan
Araki, dès son plus jeune âge et Gabriel
Veri-veri l’écrivit, interprété avec
certaines différences puisque le maître n’était plus vivant et les tohuka ne
célébraient plus ce que les missionnaires appelaient les chants paiens, le Tui
hope ou chant d’Orion.
Le calendrier des
élèves apparut dans les manucrits des Old
Ones et porte une date : te maro 1936 (juin/juillet 1936) - Le nom Arakitia fut transformé en Araki dès
le recensement de 1929.
Les descendants
sont vivants à Rapanui. Le nom de leur
ancêtre fut honoré et figure sur chacune des pages du manuscrit d’Elias
Pakarati et sur celui dont parle
Barthel dans The Eight Land.
Dessin © Lorena
Bettocchi Tori a rangi d’après Katherine Routledge.
Voici le fort
joli calendrier lunaire des élèves d’Arakitia,
en 1936, écrit par Gabriel Veri-veri.
|
He po rae o te mahina, he tahi kokore he maro 1936 |
Juillet 1936 |
. He tahi kokore He ruá kokore He toru kokore He rima kokore He óno kokore He hitu kokore He vaú te O’hua He karu teá He popo
tea He popo
mea He popo uri He popo hanga He raa hau He omo tahi |
|
He maúre He O’Hiró He rua te O’Hiro He toru te O’Hiro He ha te O’Hiro He Óno
te O’Hiro He vaú
te O’Hiro He O’Hea He O’haú He O’Huri O’Ari O’Aata A tanga A tai |
Nous
avons dans les manuscrits des Old Ones quelques indications en astronomie.
Elles furent retrouvées par les Pascuans dans le répertoire de Mgr Tepano Jaussen et les erreurs furent corrigées.
Voici le manuscrit
d’Elias Pakarati dédié a Araki-tia Pua ara Hoa a Rapu
Lmanuscrit d’Elias Pakarati Atan,
(écrivain inconnu) qui reprend les
corrections des Anciens au sujet du répertoire de Mgr Tepano Jaussen[3], ci-dessous à droite, nous informe
que les cieux sont représentés
comme des Atua (He ragi), et
que Matariki, le groupe Pléiades
est un petit filet à sept mailles, le filet de Maui.
Les
étoiles et le soleil sont représentés par la magnitude, la brillance, l’astre
figure à l’intérieur du signe. Vénus est l’étoile aux nombreux feux (hétuu ahi-ahi). La parole
hetuu pourrait être représentée par un petit cercle, un point, ce
qui serait logique.
Nous allons adopter cette hypothèse
par la suite pour essayer de comprendre comment fonctionne l’écriture
rongorongo par rapport à l’astronomie en incluant témoignage des Rapanui
eux-mêmes.
Les anciens qui les premiers
reçurent le répertoire de
Monseigneur Tepano Jaussen, d’après les récitations et répétitions de Metoro,
déduisirent que des données
astronomiques pouvaient, en effet, s’écrire de cette manière, mais avec
quelques corrections…
Le manuscrit de Gabriel Veri-veri reproduisit le
répertoire de Mgr Tepano Jaussen en tenant compte des corrections des
Anciens. La correction des Old Ones, témoigne de l’observation du ciel. Avant
correction le répertoire de Monseigneur Jaussen signalait les Pléiades
ainsi comme un filet à six mailles
et après correction des Old ones
le filet
contient sept mailles, ce qui correspond plus aux sept étoiles des
Pléiades.
He ragi
he hetuu he mahina
he raa he matariki e rua hetuu he
henua[4]
Les douze mois de l’année
changèrent en 1936
avec des mots anciens
et de nouveaux noms
dérivés du tahitien, de l’anglais ou du français
Page suivante
les
chants de Metoro devant la tablette Mamari et épigraphie (CEIPP)
[1] Le
premier lexique figure dans les documents de l’expédition de Gongalez de Haedo,
le second est le lexique du Père Hyppolite Roussel
[2] Notes de Katherine
Routledge (les anciens `Ramon Te Haha,
Hé et Kapiera lui signalèrent que les réunions annuelles avaient lieu
une fois par an à Anakena mais également durant la nuit de la nouvelle lune et
lune descendante autour du moai le plus ancien).
[3] BETTOCCHI L orena 2006 Les derniers Maori rongorongo du 20 siècle
corrigent le répertoire de Monseigneur Tepano Jaussen. Tahiti Pacifique
Magazine sept . n° 185.
[4] Signifiants : Le
ciel, les étoiles, la lune, le soleil, les Pléiades, deux étoiles, la
terre ( de nombreux signifiés
correspondent á ces signifiés).